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  • fleurysophie

2008 + 15 = 2023 // Le Conte est bon

C'est une histoire qui commence à dater. Je vous la raconte ?




Il y a près de quinze ans, j'écrivais ceci, en préambule à ce qui deviendrait un recueil aussi long que protéiforme.


'Une des fonctions essentielles du conte est d'imposer une trêve au combat des Hommes.' (-Daniel Pennac-)
Dans l'esprit de chaque adulte, quelle que soit sa culture, quel que soit son rang social, trônent en bonne place les héritages de l'enfance, parmi lesquels prédomine le souvenir souvent diffus des contes. C'est ce que vous trouverez ici sous diverses formes : des contes se voulant parfois très oraux, parfois très contemporains, mais toujours résolument 'déviants'.
D'après le site Psychologies.com, le terme de Déviance s'applique à une "manière d'être, de penser ou de se conduire qui s'écarte des standards sociaux, moraux ou culturels". De façon plus particulière, elle est employée de nos jours pour se référer, souvent avec humour, à l'homosexualité. C'est dans ce sens particulier qu'il sera utilisé ici. Rien de péjoratif donc dans son emploi.
Contrairement à ce qui est annoncé dans le titre (le recueil s'intitulait "Livre de Contes pour Enfants Déviants" ndlr.) , ces pages s'adressent à tous les enfants, de tous les âges, quelle que soit leur sensibilité, où qu'aillent leurs affections. La forme traditionnelle du conte n'est qu'un modèle et en ce sens totalement modulable. Sa trame s'articule à souhait et les figures que l'on y pose sont interchangeables. Il ne s'agit pas de faire porter au conte autre chose que ce qu'il véhicule originellement. Aussi, la quête du Prince Charmant ne doit pas être vue par les jeunes filles comme la recherche romancée de l'homme parfait, le message est bien plus simpliste et bien moins incarné. Bien plus essentiel aussi.
"A rose by any other name would smell as sweet" faisait dire Shakespeare à Juliette, autrement dit, le signifié reste le même, quelle que soit la forme de son signifiant. De la même façon, dans l'univers des contes, les travers des individus sont les mêmes, leurs bravoures ne diffèrent pas, le Grand Méchant Loup reste méchant, qu'il soit en fait loup, être humain ou vice de société. Les sentiments qui unissent les êtres demeurent identiques, que le Prince s'unisse à une Bergère, à une Princesse, ou à un autre Prince.
Les contes que vous retrouverez ici ne sont pas le fruit d'une réelle nécessité, pour cette simple raison que les contes traditionnels ne prônent pas de stéréotype de vie ou de modèle d'unité familiale, chose qui n'échappe pas à l’œil du lecteur attentif. Toutefois et en laissant soigneusement de côté tout communautarisme, il est bon d'explorer des cas de figure assez ouvertement inédits dans le monde du conte. Le choix de contes présentant des héros 'déviants' n'était donc pas tant un moyen de ma part de militer, qu'une occasion d'élargir un peu les horizons des histoires de nos jeunes années et de permettre à tous les enfants, petits et grands, de retrouve sous une forme connue des situations qui nous sont, elles aussi, de plus en plus souvent connues.
Et qui sait, puisque l'on leur reconnaît des vertus didactiques, les contes peuvent très bien, le plus naturellement du monde, faire double office en permettant à la fois d'ancrer l'homosexualité dans tous les entendements et de simplifier les choses pour des enfants qui se découvrent ou vivent l'homosexualité au quotidien dans leur environnement proche.
Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter une excellente lecture... - La Conteuse (Déviante)

Aujourd'hui, tout cela est à la fois désuet et plus que jamais d'actualité.

Je me souviens qu'à l'époque, si la main qui les écrivait le faisait avec fluidité, ce n'était pas avec la même légèreté qu'elle les mettait en ligne. Je ne crois pas que ces contes auraient existé si j'avais commencé à écrire en 2023. Je n'en aurais pas éprouvé le besoin impérieux et quand bien même l'aurais je ressenti, il aurait été étouffé dans l'œuf par les mécaniques puissantes du complexe ultime : celui de la comparaison à l'excellence et à la surabondance. Le sentiment d'illégitimité.

S'y ajoutait bien sûr alors une dimension intime, liée à des problématiques personnelles, mais elle n'était pas directement dominante : le contexte social n'était tout simplement pas le même qu'aujourd'hui.


Dans un monde où la notion de transgression (et avec elle toutes les nuances du mystère, de la pudeur et de la bravoure intime) a presque disparu, et en dépit de la conscience de ce décalage avec une société qui a évolué trop vite (en tous cas plus vite que prévu) je décide de les reprendre, de les dépoussiérer et de les réillustrer malgré tout.


Pourquoi ?

Parce que je les aime bien.

Et parce que désormais ce critère de l'affect aura une place souveraine entièrement décomplexée dans chacune de mes décisions, personnelles comme professionnelles.


En 2008, j'écrivais parce que j'en avais envie et besoin. Après quinze années à me répéter de plus en plus puissamment "à quoi bon", je pense qu'il est temps de revenir à cet essentiel là.


2008 + 15 = 2023 // Le Conte est bon.


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